Publié le : 2019-04-17 10:59:30
Catégories : Luther - 500 ans de la Réforme , Recensions
PROTESTANTISMES, CONVICTIONS & ENGAGEMENTS
Collectif sous la direction de Patrick CABANEL
Actes du Colloque tenu à l'Hôtel de Ville de Paris les 22 et 23 septembre 2017, à l'occasion des 500 ans de la Réforme protestante.
Editions Olivétan, 2019
240 pages - 25,00 €
« PROTESTANTISMES, CONVICTIONS & ENGAGEMENTS », publié aux Editions Olivetan, reprend les trois discours et vingt-neuf contributions du colloque consacré aux 500 ans de la Réforme protestante, organisépar la Fédération Protestante de France en septembre 2017 à Paris. Patrick CABANEL, directeur d’études à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, a coordonné cet ouvrage collectif.
« L’Europe et la France seraient-elles ce qu’elles sont sans les protestants ? » Dès son discours introductif, François CLAVAIROLY, président de la Fédération Protestante de France, pose le cadre : celui du protestantisme, ancré dans un riche passé, mais aujourd’hui toujours porté par un souffle qui motive les initiatives présentes et futures.
Même tonalité chez Anne HIDALGO, maire de Paris, qui note dans son discours d’accueil l’impossibilité de séparer l’audace des réformateurs d’alors de l’audace des protestants d’aujourd’hui.
« Votre identité de protestant ne se construit pas dans la sécheresse d’une sociologie mais dans un dialogue intense avec Dieu » constate Emmanuel MACRON, Président de la République, observant à son tour que, 500 ans après Luther, l’esprit de la Réforme souffle encore sur les Eglises protestantes et sur notre société.
Le lecteur est donc invité à un parcours historique et contemporain, européen et interreligieux. Sont exposés les combats de Luther, la diversité des Réformes, le protestantisme et les autres courants religieux, l’impact de la Réforme sur les arts et la culture et enfin les multiples engagements militants, citoyens et solidaires des protestants français.
Dans l’introduction du livre, Patrick CABANEL explique son optique : explorer les fondements et les effets du protestantisme, en confiant cette étude non seulement aux théologiens ou historiens de la Religion, mais à l’ensemble des spécialistes des sciences humaines et sociales.
Michel BERTRAND (doyen honoraire de l’Institut protestant de théologie de Montpellier) a assuré la direction éditoriale du livre. Il le présente rapidement et souligne que les contributions s’abreuvent toutes à une source commune : la justification par la grâce de Dieu, clé de voûte du protestantisme
Dans les deux premières parties, six universitaires, tous historiens, reviennent aux sources : Matthieu ARNOLD retrace le parcours de Luther ; Marc LIENHARD explique la traduction ecclésiale de la théologie de Luther ; Thomas MAISSEN décrit la Réforme en Allemagne et en Europe ; Neal BLOUGH traite de l’anabaptisme ; Marianne CARBONNIER-BURKARD évoque Calvin ; et Bernard COTTRET évoque la situation des îles britanniques.
La troisième partie invite quatre traditions spirituelles différentes à des regards croisés avec le protestantisme. S’y expriment un professeur de religion musulmane (Hischam ABDELGAWAD), une historienne juive (Rita HERMON-BELOT), un orthodoxe (Michel STAVROU de l’Institut de théologie orthodoxe Saint-Serge de Paris) et un historien catholique qui suggère de revisiter l’histoire conflictuelle entre catholiques et protestants (Philippe JOUTARD).
Y-a-t-il une musique protestante ? Une littérature protestante ? Un art protestant ? Ces questions sont discutées dans la quatrième partie du livre, respectivement par Katharina SCHÄCHL (pasteur), Olivier MILLET (professeur de littérature à l’Université Paris- Panthéon-Sorbonne) et Isabelle SAINT-MARTIN (directrice d’études à l’École Pratique des Hautes Études).
Enfin les trois dernières parties de l’ouvrage sont consacrées aux convictions et aux engagements des protestants qui ont influencé la pensée de l’Etat sur de nombreux sujets.
On pense bien sûr à la laïcité sur laquelle revient le sociologue Jean BAUBEROT, au combat en faveur des droits de l’homme décrit par Valentine ZUBER (directrice d’études à l’École Pratique des Hautes Études) et à la place des femmes évoquée par Gabrielle CADIER-REY (enseignante-chercheuse à l’Université Paris-Panthéon-Sorbonne).
Le sociologue Jean-Paul WILLAIME s’interroge sur une idée qui circule beaucoup aujourd’hui : la protestantisation de l’Eglise catholique et de la société. Selon lui, il faut mettre de nombreux bémols à cette thèse et noter que la protestantisation est avant tout séculière, culturelle. La façon protestante d’être religieux individuellement et collectivement reste spécifique et profonde.
Le témoignage de Catherine TRAUTMANN, qui fut maire de Strasbourg et député européenne, conclut trois articles sur les liens entre politique et protestantismes : l’histoire de l’expérience politique des protestants par l’historien Olivier CHRISTIN, l’engagement politique des évangéliques par le chercheur au CNRS Sébastien FATH, et un regard sur l’Angleterre par l’universitaire anglaise Grace DAVIE.
L’écologie est abordée par François DERMANGE (professeur d’éthique à l’Université de Genève) et Martin KOPP (président de la commission écologie-justice de la FPF).
Didier SICARD (professeur émérite de médecine et ancien président du Comité National Consultatif d’Ethique) et Philippe B. KABONGO-MBAYA (président du Christianisme social) mettent l’accent sur l’engagement solidaire, depuis toujours au cœur du protestantisme.
Enfin, Frédérique HARRY (Maître de conférences à l’Université Paris-Panthéon-Sorbonne) décrit la façon dont le protestantisme a évolué dans un pays très sécularisé : la Scandinavie.
On peut lire le livre en continu ou en sélectionnant certaines contributions. Elles sont variées, profondes et faciles à lire. Elles sont courtes et passionnantes.
Ce livre a été conçu pour témoigner et être diffusé en dehors des seuls milieux et réseaux protestants. C’est aussi un outil pour la transmission entre les générations.
Olivier ABEL (professeur d’éthique et de philosophie à la Faculté théologie protestante de Montpellier) le conclut, avec cette idée que les protestants restent appelés à une fidélité créatrice.
Brigitte EVRARD