Publié le : 2017-04-12 18:02:31
Catégories : Fenêtre sur l'art ... , Recensions
Rubrique : Fenêtre sur l’art
Située à deux pas du musée d’Orsay et du musée du Louvre, la Librairie Protestante vous propose une sélection de livres au sujet de l’art religieux en lien avec l’actualité culturelle des musées et leurs expositions temporaires.
Fenêtre sur l’art de Vermeer à l’occasion de l’exposition du musée du Louvre, printemps 2017.
Du 22 février au 22 mai, les tableaux de Vermeer et de ses contemporains hollandais sont exposés au musée du Louvre, c’est une exposition historique dont le précédent accrochage remonte à 1966 au musée de l’Orangerie.
Vermeer a marqué les esprits pour son usage savant de la lumière qui transcende tout et son génie à doser ses effets pour donner une dimension sacrée à ses compositions. Vermeer fut un témoin privilégié de la cohabitation entre catholicisme et protestantisme dans la seconde moitié du 17eme siècle à Delft, deux conceptions bien différentes de la foi chrétienne.
Comment peindre la foi, cette ferme assurance des choses que l’on espère,cette démonstration de celles que l’on ne voit pas?
C’est le thème qu’aborde cet essai d’histoire de l’art : Les peintres de l’invisible.
Le Greco, Rembrandt, Vermeer et autres messagers de l’infini
Laurent Dandrieu -Editions du Cerf
Collection Essais - 2016
139 p - 10€
L’art pictural mais pas n’importe lequel : le plus beau, le plus mystérieux, le plus lumineux, le plus proche du divin. Voilà la visite guidée très diversifiée de peintres chrétiens qui vous attend dans ce livre.
Tout d’abord autour de Fra Angelico, ce peintre qui fut un contemplatif et professait qu’on ne pouvait peindre le Christ sans le vivre. L’Eglise considéra Fra Angelico comme un chrétien d’une douceur et d’une intégrité exemplaires. Son œuvre la plus marquante resta sans doute le fabuleux ensemble de plus de cinquante peintures qui recouvrent les murs du couvent de San Marco et qui imposent le recueillement.
Puis, c’est au tour du Greco, dont les distorsions ne sont là que pour faire sens.
Champaigne, le plus emblématique d’un moment exceptionnel (le XVIIe siècle) du génie français. Il y aurait un « bleu Champaigne » comme il y a un « bleu Klein ». Plutôt que d’entrer dans l’atelier de Rubens, il décida de partir en Italie. Finalement, il s’arrêta à Paris et se lia d’amitié avec Poussin, contribuant ainsi à la décoration du Palais du Luxembourg. Chez Champaigne, la vie n’est ni absente, ni figée, elle est concentrée tout entière vers l’«unique nécessaire » qu’est la vie intérieure. Un homme qui aima la vie parce qu’elle est l’œuvre de Dieu.
Rembrandt, dont Van Gogh écrivait : « On ne peut voir un Rembrandt sans croire en Dieu ». Cette phrase atteste la place unique de Rembrandt comme peintre inspiré. Rembrandt scruta sans cesse le mystère insondable des desseins divins, la faillibilité de l’homme, son angoisse devant le jugement ultime, mais aussi la relation personnelle et salvatrice unissant l’homme à son Créateur. Il chercha inlassablement à manifester la lumière de Dieu dans les ténèbres de notre humanité.
« Pour peindre comme ça, il faut être mort plusieurs fois » dira encore Van Gogh.
Et puis, Vermeer, oublié pendant des siècles avant d’être redécouvert au XIXe siècle par des écrivains comme Théophile Gautier. Il est né à Delft en 1632 dans la petite bourgeoisie protestante. Il se convertit au catholicisme en 1653 à l’occasion de son mariage avec Catharina Bolnes qui lui donna 15 enfants. Loin de l’image d’Epinal du génie tourmenté, il mena une existence sans histoire dans cette petite ville. Il mit en scène des anecdotes aussi anodines qu’une leçon de musique, une tâche domestique ou le partage d’un verre de vin. Ses tableaux font éclater toute la charge d’éternité du moment fugace.
Puis, c’est au tour de Desvallières (1861-1950), peintre oublié mais qui, grâce à l’initiative de la maire de Paris, a été exposé en 2016 au Petit Palais, lui dont l’œuvre se tourne vers une vision mystique particulière.
On termine cette visite par les toiles de François-Xavier de Boissoudy, artiste contemporain, spécialiste des lavis d’encre, où la lumière surgit au cœur des ténèbres. Les lavis de Boissoudy nous plongent dans une atmosphère rêveuse et contemplative.
Les tableaux de ces peintres ont un point commun : la présence de Dieu, la part d’éternité en toutes choses même les plus anodines. Une leçon d’ombres et de lumières à mettre au grand jour et entre toutes les mains.
Je recommande vivement cet ouvrage, qui est une leçon d’art courte mais indispensable pour comprendre et apprécier en peu de pages plusieurs artistes d’inspiration chrétienne, certains universellement connus, d’autres plus récents.
Elisabeth Loussaut
Découvrez un autre article sur ce thème :
Fenêtre sur l’art de Rembrandt à l’occasion de l’exposition du musée Jacquemart-André, automne 2016
Retrouvez tous les articles de la rubrique fenêtre sur l'art